Constat
De nombreuses prises en charge du surpoids et de l’obésité ont été tentées ces 30 dernières années. Malheureusement, le constat est cruel : l’obésité augmente rapidement et est plus sévère. Ce constat d’inefficacité fait, il convient naturellement d’amorcer une réflexion sur le pourquoi ces échecs. D’un point de vue scientifique, les éléments étaient pourtant bien connus : Cannon et Einzig (2 scientifiques américains) expliquaient clairement il y a 30 ans que la diète (comprenez régime restrictif) faisait grossir et nous rendait plus gras.
Ces preuves établies, cela n’a pas empêché un grand nombre de professionnels (plus ou moins célèbres) de proposer des régimes tous plus ou moins farfelus : cures, hyperprotéinés, dissociés, sans glucides, sans lipides, livraison de repas (comme j’aime), ananas, queue de cerises, soupe aux choux, artichauts, sachets, poudres … , voire encore pire coupe-faim !!! L’inventivité de ces vendeurs de « rêve » est sans limite et ne cessera pas.
L’inefficacité (voire la dangerosité) de ces régimes est maintenant bien connue et établie au niveau scientifique.
Cela n’empêche pas certains professionnels se disant « nutritionnistes » de poursuivre sur cette voie menant à l’échec en surfant sur la volonté des personnes de maigrir vite sans penser à maigrir bien. Malheureusement le « fat business » a encore de beaux jours devant lui… d’autant que la pression sociale est de plus en plus forte sur les personnes souffrant d’obésité.
L’échec de ces prises en charge basées essentiellement sur la restriction s’explique par divers mécanismes complexes faisant intervenir la restriction cognitive, l’aspect gustatif, l’adhérence, les mécanismes hormonaux, la composition corporelle, le métabolisme et les principes de la thermodynamique… L’ensemble de ces mécanismes sont détaillés dans l’atelier « pourquoi les régimes font grossir » (accès patient).
Pour permettre une perte pondérale sur le long terme il est nécessaire de comprendre ce qu’est le surpoids/obésité, comment ces derniers s’installent dans notre vie, comment notre organisme fonctionne. Il est aussi important de comprendre le concept « d’obésité maladie dont le symptôme est le poids ».
Prendre en charge le symptôme ne sera jamais pertinent sur le long terme si la maladie qui est à l’origine de ce symptôme n’est pas traitée. Or les régimes, cures and co ne s’intéressent qu’à votre poids sans se soucier de son origine et de la personne qui en souffre.
Partant de ce concept tout en tenant compte que l’obésité est une maladie chronique et évolutive, il est alors logique qu’une prise en charge optimale soit basée sur les principes de l’éducation thérapeutique :
- Se centrer sur la personne (et non sur le poids…)
- Comprendre et apprendre
- Adhérer
- Construire un projet partagé
- Amorcer des changements adaptés et propres à chaque personne
- Entretenir l’adhérence
- Réévaluer et s’adapter
Il est évident qu’il est plus simple de se mettre dans position passive avec des consignes données par une « blouse blanche » (qui sont généralement les mêmes pour tous : la restriction) que de devenir acteur de la démarche de soins. La réflexion doit être plus profonde qu’une simple liste d’aliments à éviter ou à privilégier. Si ces méthodes (qui existent depuis plusieurs dizaines d’années) fonctionnaient, serions-nous dans la situation actuelle avec une explosion de l’obésité ?
Le plus dérangeant dans tout ça est que si nous expliquions aux personnes souffrant de surpoids/obésité que ces méthodes participaient à une résistance à la perte de poids sur le long terme en favorisant les reprises pondérales (rebond), peut-être seraient-elles moins nombreuses à se jeter sur le dernier régime à la mode.
Que faire ?
Basé sur les principes de l’éducation thérapeutique, le Dr Gauthier et la clinique du chalonnais ont mis en place depuis 2012 un programme de prise en charge des patients souffrant de surpoids / obésité. Il ne s’agit heureusement pas d’une cure. Ce programme de 28 jours (long et court à la fois pour aborder une maladie aussi complexe que l’obésité) fait intervenir une équipe pluridisciplinaire complète : médecins, interne de médecine, diététiciennes, psychologues, enseignants d’activité physique adaptée, infirmiers, aides-soignants, assistante sociale et attaché de recherche clinique. L’objectif est de construire un projet partagé afin d’amorcer une perte pondérale dans de bonnes conditions. Ce programme mélange : ateliers collectifs avec les différents intervenants et de consultations individuelles. Ce programme d’éducation thérapeutique est autorisé par l’ARS (Agence Régionale de la Santé) de Bourgogne.
Partant du constat que l’obésité est une maladie chronique, un suivi est proposé afin de refaire un point pluridisciplinaire en hospitalisation de jour (médecin, infirmière/aide-soignante, diététicienne, éducateur sportif, psychologue). Ce suivi, primordial, peut également être assuré par des intermédiaires non hospitaliers comme l’EMNO.
Les premiers résultats publiés de cette prise en charge à la clinique sont intéressants :
Nos patients perdent évidemment du poids, diminue l’IMC, diminue le tour de taille (environ 1 taille), perdent en masse grasse (MG) mais surtout gagnent (femmes) ou ne perdent pas (hommes) en masse maigre donc en masse musculaire. Cette évolution de la composition corporelle est impossible à obtenir avec la restriction des régimes ou cures. En effet l’impact de ces restrictions sur la composition corporelle est une baisse de masse grasse pour 75% et une baisse de masse maigre (donc musculaire) pour 25%. En clair sur 1 kg de perdu avec un régime vous perdez 750g de graisse et 250g de muscle. Lorsque l’on connait l’importance de la masse musculaire sur le métabolisme, la santé et la silhouette il est aisé de comprendre l’absence d’intérêt de ces restrictions. Un axe important de la prise en charge est de ne pas perdre en masse musculaire (ce qui est le cas au sein du programme). Toute perte de masse musculaire favorisera la reprise pondérale sur le long terme.
Force est de constater que ce programme d’éducation thérapeutique fonctionne, néanmoins le constat est que les patients sont pris en charge dans la majorité des cas de façon tardive : plus de 20 ans d’évolution d’obésité, de multiples régimes effectués, un âge avancé diminuant le métabolisme de base, des complications rendant la prise en charge plus complexe. Si ces patients avaient été orientés plus rapidement sans attendre le point de résistance, l’efficacité déjà présente aurait été plus pertinente. Un message est simple : ne pas attendre avant de prendre en charge son surpoids, évoquer le sujet avec votre médecin. Plus la prise en charge s’effectue tôt dans la vie du patient, meilleure sera l’évolution. La médecine existe pour soigner mais aussi pour prévenir !
Si pour une question d’organisation, une prise en charge de 28 jours est impossible, des consultations dédiées à l’EMNO afin d’établir un premier bilan complet et proposera la meilleure démarche thérapeutique à adopter.
Evolution des prises en charge
Pour certains patients, malgré une prise en charge optimale, l’absence de résultat significatif sur la santé est présent par : résistance à la perte pondérale, multiples complications, prises en charge trop tardives de l’obésité, obésité trop sévère… Il est possible pour une partie de ces patients de bénéficier d’une chirurgie de l’obésité.
Le Dr Gauthier (médecin nutritionniste) est dans la même position que le rhumatologue et l’arthrose : le rhumatologue prend en charge l’arthrose du genou médicalement, si l’arthrose évolue malgré cette prise en charge optimale il fera logiquement appel au chirurgien orthopédique pour une prothèse du genou. Il faut donc considérer l’obésité comme l’arthrose, si l’obésité ne s’améliore pas malgré une véritable prise en charge nutritionnelle (de ce fait excluant les régimes…) il est alors tout à fait logique de faire appel aux chirurgiens de l’obésité. La prise en charge chirurgicale est une aide lorsqu’elle est proposée dans de bonnes conditions avec une bonne préparation et un vrai suivi (ces prises en charges sont développées dans les parties correspondantes).
Tenant compte de la possibilité de chirurgie bariatrique, un programme d’éducation thérapeutique a été monté afin d’accompagner le patient opéré dans de bonnes conditions. La chirurgie pour avoir un bon résultat sur le long terme a besoin d’être préparée, d’effectuer un travail sur le comportement alimentaire (sans quoi le poids repartira à la hausse passée la phase de perte des 18 premiers mois). Ce programme dédié à la chirurgie bariatrique est de 21 jours consécutifs à l’intervention chirurgicale (habituellement le temps de l’arrêt de travail).
Les patients effectuant ce programme pourront s’alimenter en texture normale (solide) avant la fin du programme (impossible d’aller si rapidement au domicile). Un travail, mélangeant ateliers collectifs et entretiens individuels, sera effectué de façon à donner tous les éléments nécessaires à une bonne perte pondérale, associé à un bon confort digestif (chaque technique chirurgicale a ses particularités). Tout comme le programme médical, un suivi régulier est proposé en hospitalisation de jour afin de s’assurer de la bonne évolution tout en corrigeant les erreurs qui peuvent être constatées.
L’obésité est une maladie complexe, chronique et multifactorielle. Sa prise en charge est donc multidisciplinaire, complexe, doit tenir compte de réalités scientifiques et ne peut être proposée que sur le long terme incluant un parcours de soins pour être efficace.
Plus d’infos sur la nutrition, l’obésité, la chirurgie bariatrique et leur prise en charge
Dr Cyril GAUTHIER